"Nous, nous annonçons un Messie crucifié,
scandale pour les juifs, et folie pour les nations".
(1 Corinthiens 1,23)"Vous n'avez pas encore résisté jusqu'au sang"
(Hébreux 12,4)
De nombreux livres ou personnes tendent à accréditer la thèse selon laquelle, au fond, quand on les approfondit suffisamment, les sagesses orientales et le christianisme se rejoignent. Il s'agirait, dans tous les cas, de découvrir en soi quelque chose qui est plus que soi, et de communiquer ainsi avec le domaine spirituel.
Les sagesses et spiritualités orientales sont fort diverses. On se centrera ci-dessous sur un auteur particulier, Karlfried Graf Dürckheim, et notamment sur le livre "Le centre de l'Être" (Albin Michel 1996), dont les thèses sont présentées de façon séduisante.
Bon connaisseur du Japon et du zen, Graf Dürckheim a développé au cours des années 1950 à 1980 des méthodes de thérapie et de spiritualité basées sur les techniques orientales, mais tenant compte de la culture occidentale.
Lecteur de Maître Eckhart (mystique chrétien du 14° siècle - partiellement condamné par l'Eglise, il faut le préciser), Graf Dürckheim insiste d'autre part sur l'importance du corps dans la spiritualité, et écrit, à juste titre également, que certaines présentations du christianisme véhiculent "un ordre d'images et de concepts qui ne peuvent remplir (le) coeur".
Cela dit il se situe en fait entièrement dans les catégories de pensée de certaines spiritualités orientales, auxquelles il réduit ce qu'il perçoit du christianisme. Quand il parle du christianisme, il s'agit en fait d'une sorte de lecture du christianisme selon les catégories de l'orient...
*** Jésus-Christ est vraiment ressuscité; Jésus est mort sur la croix par amour. Ces deux affirmations peuvent-elles entrer dans le cadre de sagesses orientales?
La subtilité du dialogue avec ces sagesses, c'est que beaucoup des démarches qu'elles proposent sont acceptables pour un chrétien, mais que d'une part elles sont accompagnées de théories discutables ou floues (par exemple "Dieu est en moi"), et que d'autre part elles n'épuisent pas le christianisme, qui va au delà.
"Comme s'il voyait l'invisible": tel est le titre d'un livre de Jacques Loew, décrivant l'attitude de foi. Le chrétien agit en tenant compte du "réel invisible", auquel aucune sagesse ne donne accès, parce qu'il est le domaine du "Tout Autre": de la liberté de l'action de Dieu dans le monde.
Le chrétien, tant dans sa relation à Dieu que dans sa relation aux autres hommes, se situe dans l'altérité: agir dans la foi d'une façon déraisonnable à vues humaines, souffrir pour l'autre par amour, telle est la folie du christianisme. Folie pour qui n'a pas rencontré le ressuscité.
Note: un bref texte sur une question voisine figure dans le journal.